Un cadeau privilège

J’attendais ce privilège avec impatience: besoin de souffler, d’effleurer de nouveaux horizons… Libre comme un oiseau en plein envol, j’allais enfin disposer de mon temps. Fini la montre-tyran, le stress et la peur d’être en retard dans un programme trop cadré et trop chargé. Me désintoxiquer de l’hyper-activisme, me permettre des tas de fantaisies et des sautes d’humeur avec l’horloge. Quel régime exquis!

Pourtant, le sevrage n’est pas si naturel, car passer de l’agenda noirci aux pages blanches nécessite une rééducation. Les premiers mois, j’ai travaillé à la maison du matin au soir. Peut-être par peur du vide ou pour dépasser un sentiment de culpabilité de rester à la maison alors que mes collègues professeurs s’activaient encore durement. Mais cette étape privilège, je la méritais, j’avais bien le droit de me reposer. D’ailleurs, ma santé s’en est trouvée améliorée. Cerise sur le gâteau, je pouvais voyager hors saison.

Un cadeau surprise

Pour bien aborder cette nouvelle étape de vie, il est indispensable d’avoir des projets et des rêves. Les miens étaient nombreux: écriture, lecture, voyages, musique, retrouvailles entre amis, etc. Une chose était claire, j’avais envie de prendre un nouveau cap. D’ailleurs, je n’étais pas certaine de pouvoir maîtriser mes émotions en retrouvant mes anciens élèves ou en voyant des enfants partir à l’école. Alors j’ai laissé du temps passer avant de retourner voir mes collègues. Petit à petit, j’ai tourné la page, même beaucoup plus vite que je ne le pensais!

Mais je voulais aussi me laisser surprendre avec ce chèque en blanc de mon temps, ce cadeau surprise dont les imprévus et les découvertes allaient mettre du piment dans mon quotidien. La première année, j’ai eu à cœur d’entreprendre une formation à la relation d’aide chrétienne. Une grande source d’enrichissement.

Un cadeau piège

L’un des premiers pièges de la retraite est une mauvaise gestion du temps et des repères. L’hyper-organisation du planning avec une surcharge d’activités, autant qu’une trop grande oisiveté, sont à éviter. Allier organisation de son temps en maintenant souplesse et spontanéité permet un bon équilibre. Il faut trouver le rythme qui nous convient. Je me lève plus tard qu’autrefois, mais à une heure régulière afin de ne pas perdre ma matinée. Je m’habille de façon soignée comme si j’allais travailler, j’équilibre les temps à la maison et les temps de sortie, afin de ne pas m’enfermer dans une bulle.

Un autre piège courant serait de ne pas savoir dire non à toutes les sollicitations. Les retraités sont une cible facile et peuvent vite se transformer en bouche-trous ou en bénévoles corvéables à merci. Je ne cède donc pas aux pressions diverses et je choisis librement mes engagements. Alors, j’aurai du plaisir à offrir un volontariat épanouissant. La retraite est un cadeau à manier avec précaution, mais un cadeau vraiment précieux pour lequel je veux dire chaque jour merci!